Le Technology Outlook 2025 de l'Académie suisse des sciences techniques examine les compétences professionnelles qui seront nécessaires dans les années à venir dans les domaines de la numérisation, de l'énergie, de la fabrication et des sciences de la vie. L'étude fournit aux PME de nouvelles impulsions pour leur stratégie en matière de ressources humaines.

Photo : Dave Kim (Unsplash)

Traduit avec DeepL

La Suisse dispose d'un système éducatif solide et d'une main-d'œuvre hautement qualifiée. Cependant, des goulots d'étranglement apparaissent déjà aujourd'hui dans des domaines de niche spécialisés. Le Technology Outlook 2025 indique concrètement quelles compétences sont demandées dans quatre domaines technologiques centraux et où il faut agir.

Les technologies numériques : Quand la lumière transmet des données

Dans le domaine de la numérisation, une image différenciée se dessine. Alors que la Suisse est bien positionnée dans les bases des technologies quantiques, elle manque de diplômés dans les domaines hautement spécialisés. Pour les circuits intégrés photoniques, qui sont un exemple de technologie d'avenir prometteuse, l'étude identifie le manque de personnel qualifié comme le goulot d'étranglement le plus critique pour l'écosystème suisse.

Ces circuits utilisent la lumière au lieu de signaux électriques pour transmettre des données. Ils présentent l'avantage d'offrir des vitesses nettement plus élevées tout en consommant moins d'énergie. Dans les centres de calcul, ils peuvent réduire la consommation d'électricité jusqu'à 30 %. Ils ouvrent également de nouvelles possibilités dans la technique médicale, par exemple pour les biocapteurs de haute précision. Le problème réside dans les compétences spécifiques requises. On recherche des spécialistes capables de combiner la physique optique avec la technologie des semi-conducteurs et la conception de systèmes. Cette combinaison n'est guère enseignée dans les hautes écoles suisses.

Concrètement, il faut des connaissances approfondies en architecture de réseau pour la communication en temps réel, des connaissances en algorithmes quantiques et leur application ainsi qu'une expertise dans l'Internet des objets. L'industrie 5.0 en particulier a besoin de spécialistes qui ne se contentent pas de faire fonctionner les machines, mais qui participent activement à leur développement.

L'approche place délibérément l'homme au centre. Les collaborateurs ne se contentent plus de surveiller les processus automatisés, mais interviennent en cas de besoin, prennent des décisions et optimisent les processus en collaboration avec les systèmes d'IA. Un exemple pratique illustre bien cette approche. Sur une ligne de production, une IA détecte une anomalie dans le processus de fabrication et propose trois corrections possibles. L'employé évalue ces propositions sur la base de son expérience, choisit la plus appropriée et donne un feedback à l'IA. Celle-ci apprend de la décision et sera plus précise la prochaine fois. Cette forme de collaboration requiert une compréhension technique, mais aussi la capacité de remettre en question et de concevoir des processus de manière critique.

Pour les PME, cela signifie que la transition vers de nouveaux modèles d'entreprise nécessite des compétences appropriées au sein de l'organisation. L'étude recommande une promotion ciblée des talents et la mise en place d'écosystèmes d'innovation.

Énergie et environnement : la pensée systémique devient une compétence clé

Dans le domaine de l'énergie et de l'environnement, une tendance claire se dégage : les connaissances techniques isolées ne suffisent plus. La capture du carbone, les technologies de l'hydrogène et la géothermie profonde ne fonctionnent que dans un système global. L'étude parle ici explicitement de compétence systémique comme d'une capacité décisive.

Concrètement, des connaissances approfondies en ingénierie des procédés et en chimie sont nécessaires, notamment pour le recyclage des matières plastiques et du phosphore ainsi que pour les carburants synthétiques. Les sciences des matériaux gagnent en importance, tout comme l'expertise dans la construction d'installations. Pour les technologies de l'hydrogène, il faut des spécialistes qui comprennent l'infrastructure, la logistique et l'application dans différents secteurs, de l'industrie à l'approvisionnement en chaleur en passant par la mobilité.

Le recyclage des matières plastiques est un exemple de l'intégration requise. Il ne faut pas seulement un savoir-faire dans la technique des procédés et la construction d'installations, mais aussi une prise de conscience des cycles des matières premières sur l'ensemble de la chaîne de création de valeur. Les développeuses de produits doivent collaborer avec des spécialistes du recyclage. L'étude souligne qu'il s'agit de comprendre la matière première, la production, le produit, les prestations de service et le recyclage.

Deux domaines de compétence gagnent particulièrement en importance. L'analyse du cycle de vie évalue l'impact environnemental d'un produit tout au long de son cycle de vie. Un ingénieur qui développe un nouvel emballage doit non seulement vérifier sa fonctionnalité, mais aussi calculer la quantité d'énergie consommée pour sa fabrication, les émissions de CO₂ générées par son transport, la durée d'utilisation du matériau et s'il peut être recyclé. Un exemple concret tiré de l'industrie alimentaire illustre cette complexité. Un fabricant voulait passer du plastique au carton afin d'être plus durable. L'analyse ACV a toutefois révélé que l'emballage carton, en raison de son poids plus élevé lors du transport, générait plus de CO₂ que l'emballage plastique plus léger dont le recyclage était déjà établi. Ce bilan global devient la norme pour que les produits soient vraiment durables.

Parallèlement, le monitoring du CO₂ devient une obligation : les entreprises doivent non seulement mesurer leurs émissions, mais aussi les documenter et les réduire. Cela nécessite des spécialistes qui maîtrisent les techniques de mesure, savent évaluer les données et en déduire des mesures d'amélioration. Une entreprise de construction mécanique doit par exemple enregistrer les émissions générées par l'achat d'acier, la quantité d'énergie consommée par sa propre production, les émissions de CO₂ générées par le transport vers le client et ce qui se passe à la fin du cycle de vie du produit. Ces données doivent être validées et faire l'objet de rapports. En Suisse, il manque encore suffisamment de personnes formées pour assumer ces tâches.

Procédés de fabrication et matériaux : quand la chimie rencontre l'IA

Dans les procédés de fabrication et les nouveaux matériaux, les disciplines traditionnelles fusionnent avec les méthodes numériques. Le développement de bioplastiques à partir de déchets, par exemple, nécessite une compréhension de la chimie, des connaissances en sciences des polymères et des matériaux ainsi que des compétences en microbiologie. Parallèlement, les connaissances en matière de modélisation des processus et des systèmes, associées à l'intelligence artificielle, deviennent de plus en plus importantes.

Pour les matériaux 2D, les professionnels doivent pouvoir combiner la microélectronique et la production d'énergie. Pour le développement de batteries flexibles, il s'agit de combiner les propriétés des matériaux avec des méthodes de construction flexibles. L'étude constate que de nombreuses technologies nécessitent un lien entre le développement des matériaux et les domaines d'application.

La Suisse dispose ici d'une position de départ solide grâce à ses compétences en matière de recherche et à sa main-d'œuvre hautement qualifiée. Dans des marchés de niche comme le développement de cristaux synthétiques de pérovskite, les groupes de recherche et les start-up suisses sont à la pointe. Cependant, la disponibilité de personnel qualifié n'atteint souvent pas les niveaux de gestion. Si les technologies se développent comme prévu, le personnel qualifié deviendra un facteur limitant.

Sciences de la vie : quand l'IA accélère le cycle de développement

Le secteur des sciences de la vie est en train de connaître une profonde mutation. La numérisation et les sciences naturelles fusionnent. Cela se traduit par le principe de travail "Design, Build, Test, Learn", qui est déjà la norme en biologie synthétique. Avec l'IA, cette approche itérative gagne encore en importance.

Concrètement, le processus se déroule ainsi dans la biocatalyse. Les chercheurs conçoivent sur ordinateur une enzyme qui doit catalyser une certaine réaction chimique. Les systèmes d'IA proposent alors des variantes qui pourraient être particulièrement efficaces. L'étape suivante consiste à produire cette enzyme par voie biochimique et à tester ses propriétés catalytiques. Les résultats sont ensuite intégrés dans le système. L'IA apprend quelles structures fonctionnent et lesquelles ne fonctionnent pas, et propose des variantes optimisées. Ce cycle se répète jusqu'à ce que l'enzyme réponde aux exigences industrielles souhaitées.

Une entreprise suisse de biotechnologie utilise cette approche pour développer des enzymes pour l'industrie des détergents. Auparavant, il fallait deux à trois ans pour qu'une nouvelle enzyme soit prête à être commercialisée. Avec la conception et les cycles de test basés sur l'IA, ce délai est réduit à six ou neuf mois. Les professionnels doivent ici posséder à la fois des connaissances en biochimie, des compétences en analyse de données et une compréhension des méthodes d'IA.

Dans le cas de la nutrition personnalisée, les professionnels doivent être capables d'évaluer les données génétiques, biochimiques et cliniques. L'étude prédit que les compétences en matière d'applications d'IA et de jumeaux numériques deviendront cruciales. Pour les PME du secteur des sciences de la vie également, l'analyse des données, l'utilisation des Big Data et les jumeaux numériques feront partie du répertoire standard à l'avenir.

L'étude précise que les entreprises du secteur des sciences de la vie doivent disposer de connaissances de base en ingénierie et en informatique. C'est un décalage par rapport au profil traditionnel, qui reposait en premier lieu sur l'expertise biologique et chimique.

Interdisciplinarité : penser au-delà des frontières disciplinaires

Dans tous les domaines technologiques, l'interdisciplinarité se cristallise comme une exigence centrale. L'étude le formule avec précision. Un spécialiste des sciences de la vie doit être ouvert à la manière de penser des ingénieurs, des informaticiens et des spécialistes des matériaux et combiner de manière productive leurs approches et leurs capacités à résoudre des problèmes avec la sienne - et bien sûr aussi l'inverse.

Il ne s'agit expressément pas de relativiser l'expertise. L'expertise profonde reste la base de l'innovation. Ce qui est décisif, c'est la capacité à se confronter à la manière de penser d'autres disciplines et à la comprendre. Les équipes interdisciplinaires vivent de ces capacités.

Quand les diplômés font défaut

La Suisse forme chaque année environ 80 diplômés en physique quantique. On estime qu'une quinzaine d'entre eux se spécialisent dans les algorithmes quantiques, un domaine central pour les applications industrielles. Parallèlement, plusieurs dizaines de start-ups se créent actuellement dans le domaine de l'informatique quantique et des entreprises établies mettent en place des départements correspondants. L'arithmétique ne marche pas.

La situation se révèle tout aussi précaire dans le domaine des circuits intégrés photoniques. L'étude désigne ici le manque de personnel comme le goulot d'étranglement le plus critique. Le problème réside dans les compétences spécifiques requises. On recherche des spécialistes capables de combiner la physique optique avec la technologie des semi-conducteurs et la conception de systèmes. Cette combinaison n'est guère enseignée dans les hautes écoles suisses. L'ETH Zurich propose certes des modules isolés, mais un cursus complet fait défaut.

En ce qui concerne la géothermie profonde, il n'existe pas de filière spécialisée en Suisse. Celui qui veut travailler dans ce domaine doit combiner de son propre chef les géosciences, la technique énergétique et la technique de forage. Rares sont ceux qui y parviennent. Pourtant, la Confédération prévoit un développement massif de la géothermie d'ici 2050. Qui doit construire et exploiter les installations, cela reste flou.

La Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse a lancé en 2023 un CAS en Circular Economy. L'intérêt a dépassé les attentes, les places ont été attribuées en quelques semaines. Des programmes similaires sont en train de voir le jour à la ZHAW et à la Haute école spécialisée bernoise. Ces cours enseignent l'analyse du cycle de vie et l'écobilan, des compétences qui étaient considérées comme un sujet de niche il y a encore cinq ans. Aujourd'hui, les PME de l'industrie mécanique en font la demande, tout comme les producteurs de denrées alimentaires.

Dans certains domaines, le cadre réglementaire complique le développement de la main-d'œuvre qualifiée. Les bactériophages, des virus qui s'attaquent de manière ciblée aux bactéries, sont considérés en médecine comme une alternative prometteuse aux antibiotiques. En Géorgie et en Belgique, les thérapies par phages sont autorisées et utilisées de manière routinière. En Suisse, l'autorisation de Swissmedic fait défaut. Les traitements ne sont possibles que dans des cas exceptionnels. En conséquence, aucune base de spécialistes ne se développe. Les chercheurs qui font leur doctorat dans ce domaine émigrent souvent, car ils ne voient pas de perspectives d'application en Suisse.

Les limites du recrutement

Les profils de compétences nécessaires existent en trop petit nombre sur le marché du travail. Une entreprise de biotechnologie à la recherche d'un biologiste ayant une expertise en IA et des bases d'ingénieur est en concurrence avec des dizaines d'entreprises au positionnement similaire pour une poignée de diplômés. Ce calcul ne fonctionne pas.

L'élargissement systématique des compétences existantes est plus fructueux. Un chimiste titulaire d'un doctorat et disposant de dix ans d'expérience dans la recherche sur les catalyseurs peut être formé en un an à l'apprentissage automatique. Le résultat n'est pas un data scientist, mais un chimiste capable d'appliquer des méthodes algorithmiques à son domaine de spécialité. L'avantage décisif réside dans l'expertise du domaine. Le chimiste reconnaît quelles questions peuvent être résolues de manière algorithmique et quels paramètres chimiques sont pertinents pour un modèle. Un informaticien sans formation en chimie devrait acquérir ces connaissances pendant des années.

L'étude documente un point faible structurel du système d'innovation suisse. Alors que les hautes écoles font de l'excellente recherche fondamentale, ce savoir atteint l'application industrielle avec un certain retard. La cause n'est pas un manque de volonté de transfert, mais un manque de prestations de traduction. Une PME a besoin de réponses à des questions de production spécifiques, pas de papiers scientifiques. Cette traduction nécessite des personnes qui comprennent à la fois la logique de la recherche et la réalité de l'entreprise.

Certaines entreprises développent de nouveaux formats à cet effet. Une entreprise de medtech de Suisse romande emploie un collaborateur qui travaille pour moitié dans l'entreprise et pour moitié à l'EPFZ. Sa fonction consiste explicitement à traduire les résultats actuels de la recherche en développements concrets de produits. Une entreprise textile de Suisse orientale envoie régulièrement ses techniciens de processus pour des séjours de plusieurs semaines dans des hautes écoles spécialisées. Ils y apprennent de nouvelles méthodes de recyclage et confrontent en même temps la haute école à des problèmes pratiques qui sont souvent négligés dans la recherche.

La concurrence internationale pour les spécialistes hautement qualifiés s'intensifie. Les niveaux de salaire suisses ne suffisent plus à eux seuls comme argument. Les jeunes chercheurs évaluent de plus en plus la substance du contenu des projets, les possibilités de publication et de formation continue ainsi que la réputation scientifique de l'environnement de travail. Une PME qui travaille exclusivement sur des produits et ne laisse aucune place à la recherche exploratoire aura du mal à attirer des talents issus des sciences de la vie ou de la recherche sur les matériaux. Les meilleurs candidats ont des alternatives, dans les universités comme dans les grandes entreprises à forte activité de recherche.

Exigences concrètes en matière de compétences par domaine

Monde numérique

Architectures de réseau pour la communication en temps réel, algorithmes quantiques, physique optique combinée à la technologie des semi-conducteurs, conception active des interactions homme-machine.

Énergie et environnement

Génie des procédés et chimie pour les processus de recyclage, sciences des matériaux pour l'hydrogène et la géothermie, analyse du cycle de vie, surveillance et vérification du CO₂, pensée systémique transsectorielle.

Procédés de fabrication et matériaux

Chimie et microbiologie pour les bioplastiques, modélisation des processus avec l'IA, intégration de capteurs dans des systèmes complexes, analyse du cycle de vie sur l'ensemble de la chaîne de valeur.

Sciences de la vie

Analyse de données et traitement de données volumineuses, utilisation d'applications d'IA et de jumeaux numériques, cycles de développement itératifs selon le principe "Design, Build, Test, Learn", connaissances de base en ingénierie et en informatique.

Transversal

Pensée interdisciplinaire, capacité à collaborer au-delà des frontières disciplinaires, capacité d'adaptation aux changements technologiques rapides.

Auteurs : Stefan Scheidegger et Claudia Schärer

Le Technology Outlook 2025 de l'Académie suisse des sciences techniques (SATW) analyse les compétences requises dans les domaines du monde numérique, de l'énergie et de l'environnement, des procédés de fabrication et des matériaux ainsi que des sciences de la vie. L'étude complète est disponible sur technology-outlook.satw.ch/fr/