Consensus sur la stratégie de la SATW et propositions de thèmes passionnants

07:24

A l'occasion des Journées de Réflexion, le Conseil d'administration, les membres du Conseil scientifique, les responsables des plates-formes thématiques et d'autres membres et collaborateurs de SATW se sont réunis les 30 et 31 octobre à Brunnen.

Lors des Journées de Réflexion (JdR) qui se sont tenues les 30 et 31 octobre à Brunnen, le Comité, les membres du Conseil scientifique, les responsables des plateformes thématiques et d’autres membres et collaborateurs de la SATW ont débattu de questions stratégiques et thématiques.

Organisée à l’hôtel Waldstätterhof, l’édition 2019 des JdR a commencé mercredi dans une atmosphère détendue. Costas Bekas d’IBM Research à Zurich a veillé à ce que chacun ait son comptant de nourriture intellectuelle. Retraçant l’histoire de l’intelligence artificielle (IA), il a établi des comparaisons surprenantes avec la mythologie grecque, expliquant comment l’«IA étroite» («Narrow AI») s’est transformée en «IA large» («Broad AI») et a esquissé le potentiel d’une «IA générale» («General AI») dont il prévoit l’apparition en 2050. Bien que l’IA ne surpasse pas les meilleurs experts, elle se révèle supérieure à 99% d’entre eux. En se basant sur l’exemple de IBM RXN, il a démontré ce qu’il est possible de faire aujourd’hui. Considérant l’IA comme une solution à la «surcharge de données» («Data Overload») dans la science, il a expliqué comment un processus de recherche effectué avec le concours de l’IA pourrait se dérouler à l’avenir.

L’«Arbeitsakademie» acatech

Jeudi, le président de la SATW, Willy R. Gehrer a souhaité la bienvenue aux quelque trente participants. Après avoir dévoilé le programme du jour, il a également salué la présence de Dieter Spath. Le président d’acatech a ensuite brossé le portrait de l’académie sœur dont l’objectif est de créer une croissance durable et qualitative par le biais de l’innovation. La solution pour y parvenir est de réunir des experts, d’élaborer des recommandations et d’en discuter avec les décideurs. Des plateformes nationales consacrées à des thèmes tels que la mobilité sont mises sur pied et des réunions axées sur le «dialogue de l’innovation» ont lieu plusieurs fois par an avec la chancelière. Par ailleurs, les responsables d’acatech, Leopoldina et Union, les trois académies allemandes indépendantes, se rencontrent pour lancer des projets communs. L’information sur des sujets d’actualité et le lancement d’«appels à la prise de conscience» font partie de cette mission collective: «En tant que scientifiques, nous identifions parfois le changement avant la société, le monde politique et l’économie», a affirmé Dieter Spath. Le signal «industrie 4.0» a été particulièrement audible

Les 540 membres de l’«Arbeitsakademie» comprennent des techniciens et autres spécialistes disposant de hautes compétences techniques. Composé de représentants des entreprises impliqués dans des réseaux thématiques et des projets, le « Senat » assure la proximité avec l’industrie. «L’innovation ne peut exister qu’avec le concours des entreprises», a expliqué Spath. Autre condition préalable au succès, un secrétariat professionnel et efficace comptant 120 collaborateurs. Le financement institutionnel mis à part, acatech reçoit des dons de l’économie qui ne mettent toutefois pas en péril son indépendance: «Je n’ai jamais vu d’entreprise tenter d’exercer une influence de façon indécente», a confirmé Spath.

Discussion des questions stratégiques
Fabienne Marquis Weible a ouvert le volet stratégique avec l’exposé intitulé La technologie et les défis de notre société. Elle a plaidé en faveur d’une attention plus prononcée sur la question, ce qui permettrait de s’orienter vers des objectifs de développement durable (Sustainable Development Goals, SDGs). Le président Willy R. Geher a ensuite préparé les personnes présentes aux travaux de groupes. Il a souligné les développements et les défis actuels au sein de l’Association des académies. Rolf Hügli, secrétaire général, a ensuite profité de l’occasion pour présenter les options de développement. Dans un premier temps, il a toutefois énuméré les objectifs atteints dans le cadre de la stratégie actuelle et ceux qui ne l’ont pas été. Malgré des déficits dans la collaboration avec l’industrie, sa conclusion reste positive: la SATW s’est professionnalisée, sa visibilité s’est renforcée et elle est capable de mener à bien des mandats émanant de tiers. Lors de l’atelier, les questions stratégiques sur l’orientation future ont été discutées en deux groupes, puis les résultats – qui doivent servir de suggestions pour d’éventuelles adaptations stratégiques – ont été présentés en séance plénière. Les participants ont été unanimes dans leur soutien en faveur d’une SATW indépendante et d’une collaboration renforcée avec d’autres académies et disciplines. L’affirmation selon laquelle les défis sociaux exigent des approches interdisciplinaires a fait l’objet d’un consensus. La collaboration avec l’industrie devrait être renforcée, mais l’indépendance devrait être garantie.
 

Dans le cadre de la mise en œuvre de cette collaboration, Peter Seitz a présenté des propositions basées sur son analyse des besoins des PME suisses. Parmi celles-ci figuraient la création d’une «Académie de l’innovation» («Innovation Academy»), la mise en place d’un coaching en innovation ou la publication de livres blancs interprofessionnels (IA, énergie, climat, etc.). Une discussion animée s’en est suivie et des désaccords se sont fait jour sur la nature des tâches incombant à une académie et sur les domaines où la SATW jouit de la plus grande crédibilité. La concurrence avec les acteurs établis (hautes écoles spécialisées, consultants) a également été abordée. Il convient d’identifier avec précision les points forts spécifiques de la SATW et d’en tirer parti. Il est également nécessaire de travailler plus étroitement avec des associations telles que la SIA ainsi qu’avec les associations d’autres disciplines auxquelles des compétences complémentaires peuvent être proposées. Willy R. Gehrer a demandé aux personnes présentes de désigner les associations appropriées et de soumettre d’autres propositions de mesures.

Comment démanteler une centrale nucléaire?
L’après-midi a commencé par une présentation de Stefan Klute. Le responsable du démantèlement et de l’élimination des déchets chez BKW a expliqué le processus de désaffectation de la centrale nucléaire de Mühleberg. Celui-ci commencera le 20 décembre 2019 avec l’arrêt du fonctionnement de puissance. BKW tablait sur environ 300 oppositions, mais grâce notamment à une communication complète et transparente, elle n’en a enregistré que huit. Les ONG ont également été impliquées à un stade précoce. Il existe déjà plusieurs projets de démantèlement dans le monde et l’expérience glanée à ces occasions a été profitable. Sur le plan financier, le projet est sur la bonne voie, et, en l’occurrence, la Suisse fait preuve d’une transparence exemplaire. Stefan Klute a présenté les étapes techniques du démantèlement. Les structures internes sont démontées sous l’eau, réduites à la taille d’un fût puis emballées. Les flux de matières conventionnelles et radioactives sont clairement séparés durant le processus. Les déchets radioactifs sont ensuite transportés à Würenlingen. Au total, on s’attend à ce que l’opération engendre 200 000 tonnes de matériaux, dont environ 7600 tonnes d’éléments plus ou moins radioactifs. BKW procède au démantèlement en grande partie avec le concours des collaborateurs actuels, ce qui exige de ces derniers une grande disposition à accepter le changement. Cette technique a fait ses preuves, mais pour BKW, le monde politique et l’administration suisses, il s’agit d’une œuvre pionnière.

Domaines d’activité futurs potentiels
Quatre domaines thématiques présentant un potentiel pour la SATW ont ensuite été présentés. Le thème «Une économie circulaire durable» a été abordé en premier par Xaver Edelmann. Le Global Resources Outlook 2019 montre l’augmentation massive de l’extraction mondiale de matières premières depuis 1970, soulignant l’urgence de la question. La croissance économique doit être dissociée de l’utilisation des ressources et de la pollution de l’environnement, comme le prévoient les SDG. En 2014 déjà, la SATW avait diffusé une publication sur le sujet; elle devrait le faire à nouveau. Edelmann a présenté la vision, la mission et les principes de travail de la plateforme thématique «Une économie circulaire durable». L’objectif de cette dernière est de contribuer de façon significative à l’implantation du concept en Suisse.

André Golliez a présenté le concept de «Swiss Data Space», actuellement développé par la SATW et diverses autorités fédérales. Les plateformes de données telles que Facebook menacent «l’autodétermination numérique» de la Suisse. Pour répondre à ce défi, «Swiss Data Space» intègre toutes les plateformes de données suisses (interconnectées) dignes de confiance. Il est crucial que les utilisateurs aient davantage de contrôle sur leurs données. Dans ce contexte, il convient d’établir une distinction entre les données personnelles («My Data», p. ex. Midata), les données ouvertes (p. ex. OpenData) et les données partagées (Shared Data, p. ex. SPHN). La SATW peut contribuer à la création de bases éthiques, conceptuelles, organisationnelles, juridiques et techniques, construire un réseau d’acteurs pertinents ou promouvoir le développement, le fonctionnement et la mise en réseau d’écosystèmes fiables.
 

Patricia Deflorin, responsable de la plateforme thématique Industrie 4.0, a souligné les opportunités et les défis actuels en lien avec ce sujet, et cela va bien au-delà de l’«usine intelligente». Il faut en effet tenir compte non seulement de la production, mais aussi de l’ensemble de la chaîne de valeur. Une multitude de technologies de différentes disciplines avec différents degrés de maturité sont concernées. En conséquence, ce ne sont pas seulement les potentiels qui sont considérables, mais aussi les incertitudes. Par ailleurs, de nombreuses entreprises abordent la question avec des priorités erronées. Elles se concentrent en effet sur les gains de productivité et l’innovation ne joue qu’un rôle mineur. Un soutien est ici nécessaire. Un domaine où la SATW pourrait jouer un rôle actif?

C’est à Hans-Peter Meyer, directeur de la plateforme thématique Biotechnologie, qu’est revenue la tâche de conclure l’événement. Il en a profité pour distinguer les cinq types de la biotechnologie avec leurs marchés et leurs caractéristiques. La Suisse occupe selon lui une position avantageuse, mais particulière. Notre pays est la référence en matière de biotechnologie rouge et recèle un grand potentiel dans la biotechnologie blanche. En raison du moratoire sur le génie génétique, la situation est en revanche désespérée dans le cas de la biotechnologie verte. La SATW pourrait aborder des questions telles que les chaînes de valeur à base biologique, la disponibilité des matières premières ou la gestion du recyclage. En 2015, la SATW a publié l’étude «Matières premières renouvelables au lieu de matières premières fossiles» dont une nouvelle édition est prévue, le cas échéant avec une orientation légèrement différente. En outre, un forum a été créé avec la devise «Biotech beyond biopharma».

Satisfait du consensus sur la stratégie, Willy R. Gehrer a tiré un bilan positif de ces JdR et a remercié les personnes présentes pour leur engagement et leur participation active.

Renseignements
Alexandre Luyet, responsable Suisse Romande, tél. +41 79 464 89 60, alexandre.luyet@satw.ch